« Nous sommes un peu l’anti BRUT, l’anti JT » de la genèse au futur du média LES HAUT-PARLEURS

« Nous sommes un peu l’anti BRUT, l’anti JT » de la genèse au futur du média LES HAUT-PARLEURS

Interview par Clément Machetto de la Lettre de l’Audiovisuel- juillet 2019Capture d’écran 2019-07-21 à 14.29.31Comment avez-vous eu l’idée de créer “Les Haut-Parleurs” ?

C’est une idée qui m’est venue après avoir quitté Capa, réputée pour son ADN journalistique, où je développais toute la production numérique. En quittant Capa il y a 5 ans, j’ai créé FablabChannel pour développer mes propres projets avec une ligne éditoriale pilotée par le sociétal, la jeunesse, le numérique et le monde francophone. 

Une année après la création,  j’ai eu cette idée avec Les Haut-Parleurs, qui est à la fois un déclic et une convergence, de donner la parole à des jeunes reporters avec une grande liberté de ton et leur personnalité. On s’est inspiré des codes de YouTube où des jeunes s’exprimaient avec créativité, proximité et sincérité avec leur audience pour appliquer ces nouveaux codes à un journalisme de terrain, finalement assez différents de ce qui se faisait en télévision.

 Et en effet,  très peu de jeunes étudiants ou journalistes ne s’étaient emparé de youtube pour raconter des histoires qu’ils savaient pourtant filmer et raconter. Des écoles qui formatent encore trop ? Des réticences à ne pas travailler pour des médias non officiels ? Ce manque a été l’opportunité pour créer le réseau « Les Haut-Parleurs » avec en plus l’objectif de ne pas être franco-français et même d’être présents dans le monde notamment en Afrique francophone.

 L’ idée était aussi de créer une marque pérenne et de pouvoir se développer en proximité dans les régions en France comme dans d’autres pays à la façon d’une façon d’une prod start-up agile et opérationnelle. La langue française l’a permis. Pour moi, “Les Haut-Parleurs” c’est mon projet le plus ambitieux, en pleine croissance et de long terme. Nous avons eu aussi la chance d’avoir un partenaire historique et fidèle comme TV5Monde, coproducteur, rejoint maintenant par FranceTélévisions Slash, France3 Hauts-de-France et France3 PACA et d’intéresser des acteurs du développement en Afrique investi dans l’éducation aux médias et le développement de la démocratie locale, la jeunesse et le numérique.

Comment avez-vous recruté vos jeunes reporters ?

Nous les avons recruté de façon assez différente. Ils ont en général un profil journalistique, mais pas que. Souvent en Afrique, ils sont activistes, parfois blogueurs, vidéastes, artistes engagés, rappeurs, slameurs….. Après, nous les recrutons de plein de façons différentes. Nous sommes passés par des écoles comme l’ESJ à Lille, des instituts français, des médias locaux, les réseaux sociaux, le bouche à oreille etc. Bref, le recrutement est très varié. La rédac à Paris leur demande de faire un “face cam” afin qu’ils nous racontent un sujet qui leur tient à cœur. C’est aussi comme ça qu’on les sélectionne. Ils sont plus de 150 aujourd’hui.

Comment choisissez-vous les sujets à traiter ? Les reporters sont-ils totalement autonomes ou doivent-ils respecter un cadre prédéfini ?

Ils ont beaucoup de liberté dans un cadre donné qui fait partie de la charte des « Haut-Parleurs » notamment, ils proposent un sujet qui concerne leur génération là où ils habitent, ils incarnent et concluent leur vidéo. Ce sont aussi eux qui tournent et montent leur sujet soit seuls soit accompagnés d’un cadreur et d’un monteur. 

Souvent nous leur proposons des thèmes selon des commandes ou des évènements. Par exemple, nous venons de faire une série de 15 vidéos de 6′ de dialogue entre deux “Haut-Parleurs” de chaque côté de la Méditerranée (France, Maroc, Algérie, Italie, Tunisie, Grèce …) avec TV5Monde et France3Paca. Cette série nous a d’ailleurs permis d’être sélectionnés parmi les projets choisis par la société civile lors du sommet de la Méditerranée en juin dernier. En fin d’année dernière, nous avions produits une série « Résiste » diffusée au Théâtre National de Chaillot et reprise par tous nos partenaires pour les 70 ans de la Déclaration des Droits de l’Homme. Plus de 400 vidéos ont déjà été réalisées. En début d’année, nous avons traité de la Puissance des mots pour la journée de la Francophonie avec l’OIF.

 L’équipe à Paris assure un encadrement éditorial de rédaction en chef ainsi que la post production, la gestion administrative, l’animation du réseau et des réseaux sociaux. Ce qu’il y a d’innovant c’est que tout le process est fait en ligne ou bien par téléphone. Tout se fait manière très fluide grâce aux moyens de communications dont nous disposons aujourd’hui et les outils mis en place. 

Concernant leur liberté éditoriale, une fois qu’ils ont accepté la charte et le projet proposé, la forme de leur sujet (rap, photo, documentaire, vlog etc.) est totalement libre et leur indépendance garantie. Nous sommes un peu l’anti-Brut, l’anti-JT ! Leur personnalité va de pair avec l’endroit où ils se situent, leur culture, leurs contraintes démocratiques… Nous donnons la parole à ceux qui sont chez eux. C’est un peu notre patte à nous. Notre format permet un mode d’expression qui n’existe que très peu ailleurs. 

Après la sortie de “Coming out”, quels seront les autres sujets qui seront prochainement abordés par “Les Haut-Parleurs” ?

Nous avons effectivement produit une série baptisée “Coming out” qui a été tournée en France et au Burkina Faso ainsi qu’une autre “Plusieurs vies” avec un jeune de 25 ans pendant sa semi-liberté pour FranceTVSlash et TV5Monde. 

Nous varions maintenant les formats: des courts, des formats sériels feuilletonnants ou pas, des unitaires longs et des magazines. 

Cet été, nous sortons la série  “Séduire ou la drague selon les femmes” toujours autour de la Méditerranée. Pour la rentrée, une série sur les plus endroits de la Guinée encore totalement inaccessibles aux touristes, une série au Sénégal qui s’appelle “Les Rebelles du micro” où l’on découvrira des musiciens avec des profils assez atypiques dans des cultures où la musique joue un grand rôle de lien social et de sortie de la précarité, une série sur les troubles mentaux des jeunes, une autre pour comprendre le désarroi de la jeunesse au Mali. 

Hormis “Les Haut-Parleurs”, quels autres projets avez-vous avec FabLabChannel ?

Nous développons des documentaires. Nous avons par exemple produit des séries documentaires pour France TV Slash comme “Entre meufs” réalisée par Léa Bordier avec une suite en développement un peu plus musclée 🙂  Nous développons aussi des fictions de comédie pour la jeunesse et les jeunes adultes. Nous surfons sur le succès que nous avons eu avec “Les tactiques d’Emma” pour Gulli qui a littéralement cartonné avec 60 millions de vues sur youtube !  A suivre !